« BATMAN ARKHAM ORIGINS » VS PROCRASTINATION
Une sortie en famille, une ruelle obscure, deux coups de feu, un collier de perles qui se brise et un fils unique qui devient orphelin. Tels les ingrédients d’un rituel satanique, voici ceux permettant d’invoquer le Batman dans l’imaginaire du public. Cette origine tient en seulement deux pages et une douzaine de cases lorsqu’en 1940, soit une année après sa création, il s’agit de trouver une justification au fait qu’un homme sorte la nuit habillée en chauve-souris. Un traumatisme qui a donné lieu à de multiples déclinaisons du chevalier noir, tous supports confondus.
Selon le format et l’auteur qui a la charge de revenir à la source, cette prémisse différera légèrement selon les préférences de celui qui se chargera de cette réécriture. Ainsi, il est admis dans les comics que c’est après une séance de cinéma que la tragédie a eu lieu. À l’affiche, c’est Le masque de Zorro qui viendra s’intégrer dans la mythologie quand Christopher Nolan privilégiera plutôt une pièce de théâtre jouant Faust dans Batman Begins. Ce reboot de la franchise cinématographique implique aussi l’éco-terroriste Ra’s Al Ghul en tant que meurtrier des Wayne, même si cela se fait de manière indirecte.
Lors de sa première adaptation sous l’influence de Tim Burton, c’est le Joker qui aura cette responsabilité de façonner sa némésis en faisant de lui le responsable. De quoi rendre furieux les puristes pour ce manque de fidélité au matériau de base voyant un simple malfrat commettre ce crime. Selon la version, il s’agit soit d’un anonyme, soit de Joe Chill (que l’on pouvait voir aussi dans la version de Nolan en tant qu’instrument du méchant principal), mais tous ces éléments interchangeables qui composent ce mythe fondateur qu’est Batman ont aussi eu leurs modifications dans les comics.
Une actualisation au fil des décennies depuis sa création afin d’ancrer le personnage dans son époque. Mais les origines en question n’ont pas toujours concerné cette partie de la biographie du personnage, que l’on pourrait réserver à Bruce Wayne. Tout comme ce héros est schizophrène, il y a également deux points d’entrées et le second n’est autre que les premières années de service en tant que vigilant. Frank Miller a inauguré cette période avec son Year One, suivi en toute logique par une deuxième année, mais par un autre auteur, en réponse au succès de ce retour en arrière.
D’autres récits choisiront de s’inscrire dans ce cadre pour profiter d’un Batman encore inexpérimenté comme Un long Halloween, La proie, The mad monk… C’est un âge où le personnage rencontre pour la première fois ses ennemis de toujours alors qu’il n’est pas encore le fin limier que l’on connait. Il fait des erreurs, son costume est loin d’être au point, ses rapports avec la police ne sont pas au beau fixe et son organisation laisse à désirer. De quoi rajouter du challenge pour un héros qui se sera confronté à toutes sortes de menaces au fil des décennies.
Et parmi ce florilège d’aventures qu’une seule vie d’homme ne suffirait pas à remplir (de quoi se demander si, à l’instar de Catwoman, lui aussi ne dispose pas de neuf vies), toutes n’ont bien évidemment pas été écrites par Bob Kane. Bien avant la mort de son créateur, Batman était déjà à l’affiche de plusieurs séries de comics en parallèle afin de continuer sa lutte contre le crime sur tous les fronts. Des scénaristes se sont alors emparés du mythe pour en livrer leur propre version, combler les zones d’ombres de son passé, explorer plusieurs futurs potentiels… Tout cela sans se soucier d’une question de légitimité.
Le studio Rocksteady s’est retrouvé dans le même cas de figure pour leur jeu vidéo Arkham Asylum qui reprenait le titre d’un célèbre arc narratif sans en être une adaptation. Mais la qualité étant au rendez-vous, ils ont vite été vus comme étant les gardiens du temple pour le support vidéoludique. Cette excellente impression s’est confirmée avec Arkham City et pour combler l’attente avec un dernier opus venant clore la trilogie sur les consoles next gen, une préquelle est mise en chantier par un autre pool de développeurs. Un changement d’équipe créative qui laisse planer le doute quant à la cohérence avec la franchise Arkham qu’ils n’ont pas créée.
Pourtant, Rocksteady n’a pas plus inventé le Dark Knight que Warner Bros Games Montréal, chargeait de s’inscrire dans le même univers, mais ils ont pour eux d’avoir imposé leur vision unique du personnage. De là à y voir une démarche opportuniste de la part de cette branche de Warner Bros Interactive Entertainement, ils ne pouvaient pas faire plus mauvaise impression. Si les premiers auteurs à avoir repris le chevalier noir dans les comics ont été vus d’un oeil suspect, alors il en est de même pour ceux dont il ne s’agit ici que du deuxième jeu. Avant cela, leur seul fait de gloire est de s’être fait la main sur le portage de Arkham City sur la WII U (Armored Edition), ce qui est un premier contact avec cette franchise à succès.
Ce que l’on pouvait craindre de la part de novices, d’une certaine façon en termes d’expérience, s’avère finalement en accord avec la nature du projet. En effet, prendre les commandes d’un Batman moins expérimenté, origine oblige, par un studio qui l’est tout autant, c’est cohérent. Mais risqué du point de vue de l’image renvoyée aux joueurs qui ont été habitués à un certain niveau de standing. Les fans d’Arkham se retrouveront donc devant un jeu qui, contrairement aux deux précédents opus, n’est pas développé par Rocksteady et contrairement au dernier en date, n’est pas une séquelle.
Pour couronner le tout, Paul Dini, scénariste de la série animée Batman des années 90 et recruté en guise de caution qualité pour sa connaissance de l’univers de la chauve-souris, n’est plus de la partie après avoir oeuvré sur Asylum et City. L’auteur y avait clos son arc narratif sur une chose assez inimaginable et définitive: la mort du Joker. À partir de là, le seul moyen de profiter à nouveau de la présence du clown était de faire machine arrière. Plus précisément, 5 ans avant les événements du tout premier jeu et alors que Bruce Wayne a endossé la cape et le masque depuis 2 ans. Et même s’il attire l’argent en tant que milliardaire, son alter ego est un sérieux concurrent avec la prime qui pèse sur sa tête.
Une épée de Damoclès qui va prendre la forme du sabre de Deathstroke. Le mercenaire borgne fera tout pour empocher les 50 millions de dollars promis par Black Mask, tout comme Firefly, Copperhead, Deadshot, L’électrocuteur, Shiva et Bane. Cette liste non exhaustive, puisque l’on sera amené à croiser d’autres visages connus de la faune de Gotham, offre un challenge assez conséquent. Mais il faut avouer que même si l’on reste dans le cadre d’un jeu vidéo où l’aspect interaction est privilégié, cela reste un prétexte scénaristique qui fait pâle figure face à la complexité des autres volets.
À cela, il faut ajouter le commissaire Gordon à la tête d’une escouade chargée de stopper celui qui sera son futur allié contre le crime. Bien que cela fasse partie intégrante de la mythologie du personnage à cette période de son existence, il est intéressant de voir en cette police une projection des fans de la saga Arkham qui se méfie de ce nouveau jeu, confectionner par des inconnus, jusqu’à ce qu’il fasse ses preuves. Une mise en abime donc, qui a le mérite de mêler la confection du jeu à son histoire. Pourtant il s’agit bien d’un cadeau et le fait de situer l’intrigue la nuit de Noël n’a rien d’anodin.
La map de la ville, relativement étendue, est recouverte de neige et les flocons qui tombent donnent une ambiance vraiment géniale, rappelant au passage Batman le défi. Une impression renforcée par la présence au casting vocal du même doubleur pour le Pingouin que dans le second opus de Tim Burton. Et si l’on tend bien l’oreille, c’est également la voix française du Joker de Heath Ledger qui nous offre des répliques toutes plus cinglantes les unes que les autres. En somme, un épisode de Batman qui se fait en terrain connu (avec la Bat-cave à l’honneur) et en famille.
Sauf qu’il leur reste encore à faire connaissance, car dans cette préquelle, le chevalier noir n’a jamais entendu parler du Joker dont on peut assister ici aux prémisses de cette relation. La némésis y est complètement suicidaire face à un Batman qui le sauve lors d’une chute libre, ce qui a pour effet de le faire littéralement « tomber amoureux ». Une bien belle manière d’illustrer cette connexion qui va faire d’eux des ennemis intimes. Tellement qu’il nous est même offert l’opportunité de contrôler le clown lorsqu’il était encore Redhood et juste avant qu’il ne soit immergé dans la cuve de produits chimiques de Ace Chemical.
Ce niveau psychédélique fait ainsi écho aux hallucinations de l’épouvantail dans Asylum et celles de Ra’s Al Ghul dans City, mais aurait mérité un tout autre traitement. En effet, il aurait été préférable de développer ce personnage et son gang afin d’offrir une véritable tension dramatique. C’est regrettable, même si cette prise de contrôle temporaire s’avère jouissive et parfaitement intégrée à la narration puisque cela se fait lors de la thérapie avec Harleen Quinzel. Et dans l’univers du Dark Knight, qui dit thérapie dit asile et qui dit asile, dit Arkham… Qui n’est pas présent!
Le nom du célèbre institut à beau orné le sous-titre, son absence reste à déplorer. Une démarche commerciale cherchant à ne pas semer le doute chez les fans de la première heure mais qui est quand même bien mensonger. Il est vraiment dommage de vouloir à tout prix capitaliser sur la marque de la franchise Arkham par souci de marketing alors qu’il aurait été tellement plus logique et judicieux d’intituler cet épisode « Blackgate« . Même la déclinaison sur PS Vita avait fait ce choix, car c’est bien de cet établissement pénitentiaire dont il est question.
Contrairement au premier opus, nous n’y sommes pas enfermés et l’on profite de l’ouverture des quartiers de Gotham pour se garder la fameuse prison en guise d’ultime niveau. Dommage de ne pas avoir opté pour une immersion entre ces murs durant la totalité afin que les développeurs de Warner Bros Games Montreal puissent imposer leur créativité. En choisissant Gotham comme terrain de jeu, ils héritent fatalement de ce qu’a fait Rocksteady et souffrent donc de la comparaison. Cela aurait pu être l’occasion de partir sur de nouvelles bases en créant deux univers bien distincts, l’un avec tous les fous et malades mentaux que l’on a pu voir jusqu’à présent dans les Arkham originaux et de l’autre, celui-ci faisant la part belle aux brutes épaisses de cet univers carcéral.
Une occasion manquée de se démarquer pour un jeu qui est finalement dans la continuité de ce qui a été instauré auparavant. Tellement qu’il se retrouve coincé entre l’envie d’innover, comme tout nouveau jeu faisant suite à d’autres opus, et le fait de régresser en situant son récit chronologiquement avant les autres pour en raconter les origines. Le fond et la forme sont donc en contradiction et si cela ne pose pas de problème pour l’histoire en général, il en est tout autre pour les mécaniques de jeu. Si les combats ou l’infiltration dans les conduits restent inchangés, voir ont subi quelques légères améliorations, l’arsenal du héros a quant à lui été grandement upgradé.
Outre les armes, ce sont surtout les phases en détective qui souffrent de ce problème de continuité. Sans pour autant que l’on ne soit dans le cas d’anachronisme, puisque cet opus ne se passe que 5 ans avant l’épisode fondateur qu’est Arkham Asylum, il y a tout de même un gouffre technologique en ce qui concerne l’équipement mis à notre disposition. Là où il n’était possible que de changer de vision pour en repérer des indices sur les lieux, ici on a la possibilité d’examiner la scène de crime sous la forme d’une interface holographique qui se génère dans la pièce.

Cela offre un rendu visuel semblable à ce que l’on peut voir dans le film Prometheus (qui était lui aussi une préquelle et avait aussi dû faire face à cette contradiction), lorsque les explorateurs assistent à ce qui a précipité la chute des Ingénieurs dans un enregistrement posthume. C’est le même principe sauf que là il s’agit plus d’une extrapolation de ce qui a pu se passer en fonction des preuves que l’on récolte sur le terrain. S’en suit des simulations permettant de voir ce qui a pu potentiellement se passer, avec plus ou moins d’exactitudes, mais aussi de rembobiner pour voir l’action sous un autre angle.
Abstraction faite de cette incohérence avec ce qui a été instauré dans Arkham Asylum, cette manière de procéder et d’analyser notre environnement renouvelle grandement le plaisir de jeu. À ce titre, on sent que les développeurs ont travaillé sur Armored, portage de Batman Arkham City sur WII U, qui poussait un peu plus les fonctionnalités de notre équipement pour s’adapter à la console de Nintendo et son gamepad doté d’un écran. Mais ce procédé, qui partait d’une bonne intention (et qui en est une) au risque de ne pas être en accord avec le premier jeu avec lequel il est censé se raccorder, n’est pas le seul à mettre en cause.
S’il s’agissait là d’une erreur sur la forme, le fond se confronte lui aussi à un problème de taille. Et pour le coup, il ne s’agit pas d’une amélioration de la part de Warner Bros Games Montréal mais d’un élément qu’ils ont conservé tel quel sans se soucier de sa pertinence: le Bat-signal. Intégré d’une façon très intelligente et pertinente par Rocksteady dans Asylum puis repris en toute logique dans City pour repérer au loin les endroits où l’on est censé se rendre, sa présence ici n’a pas lieu d’être au regard de l’intrigue mise en place. En effet, aucune alliance n’a été conclue entre Batman et les forces de l’ordre, au contraire ces dernières le traquent.
Il n’est pas encore question d’un Bat-signal en guise de communication entre les deux parties et le voir briller dans le ciel de Gotham est une erreur de continuité de plus. Il y avait pourtant une autre possibilité à explorer avec le Bat-plane qui nous assiste dans nos déplacements tout au long de l’aventure. Le mettre en stationnement dans les airs au-dessus de notre point de rendez-vous, lui faire projeter le fameux Bat-signal au-dessus de la zone à atteindre ou alors voir la silhouette de l’engin se découper dans le cercle de la lune en guise de repère visuel, auraient été beaucoup plus judicieux.
Mis à part pour une question de respect du background mis en place par Rocksteady, il aurait été bienvenu d’avoir plus d’autonomie avec le Bat-plane. Celui-ci est utile pour parcourir Gotham d’un bout à l’autre, mais sans pour autant en prendre le contrôle. C’est véritablement frustrant d’être limité à des cinématiques pour simuler chaque déplacement. Il y a aussi une redondance qui se fait sentir dans l’utilisation des séquences utilisées pour illustrer Batman s’insérant dans le cockpit, le vol du Bat-plane et le largage de son occupant pour fondre sur son point de chute.
Au moins, on peut profiter d’une belle mise en scène lors de ces moments en chute libre avec une caméra suivant le personnage de profil et à l’horizontale. Une réalisation dynamique qui s’applique à l’ensemble des cut-scènes mais qui n’est pas pour autant générée par le moteur du jeu, comme c’est bien souvent le cas pour gagner du temps. Là, les plans y sont soignés même si cela n’atteint pas la qualité de la vidéo destinée à promouvoir ce nouvel épisode. En effet, comme pour Akham City, il est regrettable de ne pas avoir accès à cette séquence incroyable qui est cette fois-ci supervisée par Tim Miller.
Il est de plus en plus courant de voir des réalisateurs de cinéma venir dans le milieu du jeu vidéo comme ce fut le cas pour Jospeh Kosinski et son spot TV sur Assassin’s Creed Unity. Là, en moins de 5 minutes, on assiste à une bande démo du réalisateur qui n’est pas pour autant novice dans l’animation puisqu’il possède son propre studio (Blur) et lancera par la suite l’anthologie Love, Death & Robot sur Netflix. Miller y met en scène Deathstroke alors qu’il aura l’opportunité de réaliser quelques années plus tard Deadpool. Ironique lorsque l’on sait qu’outre un look similaire, le mercenaire déjanté de chez Marvel a été créé en réponse à celui de DC Comics.
Dans un combat parfaitement chorégraphie, ce dernier dispose d’une puissance digne d’un Terminator pour ce qui reste un échauffement avant que Tim Miller ne s’occupe de Terminator Dark Fate. Cette adversité on la retrouve aussi dans le combat contre ce boss qui pourtant n’est que le deuxième sur la liste après Killer Croc. Même en mode facile, il est extrêmement difficile à vaincre et c’est à se demander si quelqu’un a testé le jeu. Il aurait été plus cohérent de le placer dans les derniers afin d’avoir une difficulté qui va crescendo. Toutefois, la réinterprétation de ce personnage pour la franchise Arkham reste bien penser et non sans rappeler une icône des jeux vidéo.
Avec sa combinaison et son cache-œil, on croirait devoir se battre contre Solid Snake de la saga Metal Gear Solid. Cette ressemblance, il n’est pas le seul à la cultiver puisque l’on retrouve un autre antagoniste qui n’est qu’un clone de ceux existant dans les autres opus. Je pense notamment à Copperhead qui est le mélange entre Harley Quinn, pour le look, et Catwoman pour les capacités. Et avec en prime des hallucinations à la Ra’s Al Ghul. Heureusement, il y a tout de même d’autres adversaires à la hauteur comme Bane, et d’autres qui prennent de la hauteur comme Firefly. Muni d’un Jetpack, il offre un combat assez intéressant sur un pont en ruine, rappelant les meilleures phases de plate-forme de Uncharted.
Mais le meilleur reste bien entendu le Joker qui bénéficie d’une écriture fidèle à l’essence du personnage. Malgré l’absence de Paul Dini, dont le remplacement aura nécessité pas moins de 4 scénaristes (Dooma Wendschuch, Ryan Galletta, Corey May et Geoff Johns), le clown a le droit à une origin story en phase, non seulement avec ce qui a été instauré dans les jeux mais aussi bien sûr dans les comics. Son saut dans une cuve de produits chimiques alors qu’il est Red Hood, la présence de Batman sur les lieux qu’il perçoit comme une hallucination démoniaque, leurs retrouvailles alors qu’il est devenu le Joker et tombe amoureux de sa némésis, tous ces éléments sont réinterprétés de la plus belle des manières.
Le plus inventif étant la manière dont le Joker raconte ces événements de son point de vue à Harleen Quinzell, qui est alors en charge de son dossier en tant que psychiatre, et qui s’imagine que le clown la drague alors qu’il est en train de déclarer sa flamme à l’homme chauve-souris sans le nommer expressément. On assistera alors à l’amour naissant de la jeune femme, complètement sous le charme, et c’est ce qui s’appelle une narration de haute volée. Et cela se poursuivra jusque dans l’enceinte de Blackgate que le Joker aura pris sous son contrôle pour le grand final.
À plusieurs reprises on avait pu voir le côté suicidaire du Joker, mais là c’est on ne peut plus explicite lorsqu’il décide de se mettre sur la chaise électrique de son plein gré afin de forcer Batman à tuer Bane. Un dilemme pour celui dont le code d’honneur est de ne jamais prendre une vie et c’est avec ce genre de choix cornélien que l’on se rend compte que les scénaristes en charge ont parfaitement compris le sadisme de cette figure du mal. Le choix de Bane n’est pas non plus le fruit du hasard pour cet avant-dernier affrontement, puisqu’il préfigure l’intérêt du clown pour le sérum qui donne sa force au colosse et qui lui donnera un aspect informe en guise de boss de fin dans Arkham Aslyum.
Tout n’est donc pas parfait, mais les choses se raccordent assez bien avec les opus de Rocksteady dans les derniers niveaux. La prison de Blackgate étant loin d’être suffisante pour contenir les menaces qui rôdent à Gotham, décision est prise par Quincy Sharp, lors d’une interview à la radio, d’annoncer la réouverture de l’asile d’Arkham. Une fois le générique écoulé, on assiste même à une scène post-génétique, dans la plus pure tradition des adaptations de comics, annonçant le recrutement de Deathstroke en prison par Amanda Waller pour faire partie de la Suicide Squad. Sauf qu’aucun jeu sur la Task Force X ne verra le jour suite à ce teasing.
Pour prolonger le plaisir, il ne reste donc que 2 DLC aussi dispensables l’un que l’autre. Le premier s’intitule Initiation et propose de prendre le contrôle d’un jeune Bruce Wayne alors qu’il termine sa formation dans un temple avec des ninjas. Ce qui était une bonne idée sur le papier s’avère être une totale déception. Sans réelle narration sur laquelle se reposer, cela n’est guère plus qu’une succession de défis à accomplir. Si ce passage avait été un peu plus travaillé, il aurait pu s’intégrer dans le jeu de base en tant que tutoriel. D’ailleurs, et cela vaut aussi pour les autres opus, je n’ai jamais compris pourquoi la franchise n’avait pas pris exemple sur les Tomb Raider en proposant une exploration du manoir Wayne pour se familiariser avec les commandes.
Néanmoins, celui-ci sera présent dans le second DLC nommé Cold, cold heart et qui laisse tout autant de glace que le premier. Mais il a au moins pour lui de raconter quelque chose et de mettre en valeur Mister Freeze. Comme je le disais, on a le plaisir d’enfin évoluer dans le manoir familial, du moins on le fuit puisqu’il est en feu. Une situation qui rappelle fortement Batman Begins, devenu une sorte de modèle lorsqu’il s’agit de retranscrire une énième fois les débuts du chevalier noir (tout comme Initiation le faisait avec son entrainement chez les ninjas). Puis on sort en ville pour poursuivre notre enquête, et par extension Victor Fries.
Mais mis à part un nouveau costume, conçue pour supporter les températures négatives et rappelant furieusement la carrure et le design de celui d’Azrael, cette extension ne propose rien de neuf. Elle reprend même des ficelles scénaristiques de Arkham City comme le largage de ce nouveau costume à travers une capsule. Du reste, cela aurait pu figurer dans le jeu en lui-même tant il n’y a pas la moindre trace d’amélioration. Il y a toujours ces fameux ralentis, qu’ils soient volontaires lorsque Batman assène le coup de grâce à un adversaire d’une manière stylisée, ou involontaire lorsqu’il y a trop d’ennemis présents à l’écran.
Chronologiquement parlant ces deux DLC font office de préquelle à cet Arkham Origins, tout comme ce dernier peut être considéré comme un DLC géant à Asylum et City. Une sorte de hors-série qui ne s’apprécie vraiment que si l’on a joué aux productions de Rocksteady. On y assiste à l’avènement des super-vilains sur les gangsters, on ne peut plus explicite lorsque le Pingouin torture Falcone, et on ressent une forte influence au run Un long Halloween qui abordait également cette transition. Arkham Origins en est donc lui-même une en attendant Arkham Knight qui viendra clore cette aventure. Cette parenthèse proposée par les studios Warner Bros Games Montréal envoyait un mauvais (bat)signal à la communauté de gamers fidèle à Rocksteady, mais au final ils ont su surprendre par leur statut d’outsider.
« BATMAN ARKHAM ORIGINS » WINS!