« DOOM PATROL: SAISON 1 » VS PROCRASTINATION
Rares sont les séries où l’on peut voir un culturiste en slip léopard faire un câlin à un personnage cartoon gonflable dans une rue non binaire et sous le regard de ses compagnons que sont un robot, une schizophrène, une pâte informe sous l’apparence d’une femme et enfin un homme à l’apparence de momie. Et tout cela, d’une manière sincère sans que l’on ne pense une seule seconde à se moquer de la situation. Cette situation quelque peu rocambolesque, et totalement loufoque dès que l’on tente de la décrire en la sortant de son contexte, n’est qu’une parmi tant d’autres. Derrière ce pittoresque panel de personnages se cache la Doom Patrol.
Inconnue au bataillon pour le grand public néophyte et assez confidentielle même pour les fans de comics, ce n’est pas pour autant une bande dessinée issue d’un obscur éditeur indépendant. Mais il persiste tout de même une impression de déjà vu et pris séparément, chacun d’entre eux évoque un personnage issu d’un autre groupe. Ainsi le look de Negative Man n’est pas sans rappeler l’homme invisible de La ligue des gentlemen extraordinaires. Les bandelettes qui le recouvrent totalement sont suffisamment évocatrices sans pour autant qu’elles ne dissimulent sa transparence aux yeux du monde.
Au contraire, ce qu’il cache c’est une peau brulée digne de celle de crâne rouge dans le téléfilm Captain America. Une chair à vif qu’il ne veut pas imposer à la vue des autres tout comme à la sienne lorsqu’il se regarde dans un miroir. Il y a de quoi faire des cauchemars et les circonstances de son accident sont déjà suffisantes pour l’empêcher de fermer l’oeil. Et lorsqu’il y parvient, c’est parce que son colocataire corporel a décidé de s’éclipser en prenant la forme d’une silhouette d’énergie. La rencontre avec ce parasite remonte à lorsqu’il était pilote pour l’armée et ce dernier vol a scellé leur union en maintenant en vie celui qui s’appelait alors Larry Trainor.
Incarné par Matt Boomer, j’ai trouvé qu’il s’agissait d’un choix extrêmement osé que de caster un beau gosse tel que l’acteur pour ensuite le recouvrir d’une couche de maquillage puis de bandelettes. Fort heureusement pour la gent féminine, de nombreux flashbacks viennent enrichir son personnage avant qu’il ne devienne Négative Man. Cette négation concerne aussi la gent féminine puisque son personnage se révèle être gay et l’on peut suivre sa romance secrète alors qu’il est marié à une femme. L’époque à laquelle se déroulent ses flashbacks n’étant pas forcément propice à la révolution sexuelle.
Pourtant, la série se déroule bien de nos jours ce qui veut dire que cette entité avec qui il doit composer le maintient en vie malgré les années. Et il n’est pas le seul à devoir cohabiter avec quelqu’un d’autre puisqu’il devra faire équipe avec Crazy Jane qui doit son surnom à sa schizophrénie. Et ce n’est pas peu dire puisque ce ne sont pas moins de 64 personnalités qui co-existent et prennent le relais à tour de rôle lorsque la situation l’impose. En effet, chacune d’entre elles dispose d’un pouvoir en particulier ce qui est bien utile pour affronter la réalité à laquelle doit faire face Jane.
Ainsi, selon les dangers qu’elle rencontre, elle peut faire appel à Hammerhead, Silver Tongue, Flit et bien d’autres dont les pouvoirs vont de la pyrokinésie au philtre d’amour. Ces changements sont visibles dans son comportement, mais aussi dans son look vestimentaire tandis que l’actrice Diane Guerrero adapte son jeu en conséquence. Elle est loin de nous gratifier d’une performance aussi bluffante que celle de James McCavoy dans Split, mais elle relève tout de même le défi de donner vie à autant d’incarnations différentes d’une scène à une autre. L’épisode 9, sur les 15 que compte cette première saison, lui est d’ailleurs entièrement consacré.
Celui-ci se déroule dans un endroit appelé l’Underground et qui fait office de refuge mental à l’ensemble de ses personnalités. C’est là l’occasion pour elle d’affronter l’un de ses traumatismes d’enfance sous la forme de son paternel. Victime de viol par ce dernier, c’est ce qui provoquera le schisme de sa santé mentale qui volera en éclat, 64 morceaux pour être précis. Chacune est pourvue d’une volonté propre dans ce trip psychédélique qui la voit affronter son père sous la forme d’un géant composé de pièces de puzzle. Encore une fois, dit comme ça, il peut être difficile de cerner l’identité de cette série lorsque l’une de ses protagonistes en dispose d’une soixantaine.
Et pour ne pas arranger les choses, Crazy Jane ne sera pas la seule fille du groupe. Bien que depuis son accident il soit compliqué de dire si oui ou non elle a toujours quelque chose de féminin, Rita Farr est tout ce qu’il y a de plus normal au premier abord. Mais derrière cette plastique avantageuse, selon les stéréotypes véhiculés par les films noirs d’antan, se cache Elasti girl. Il s’agit d’une espèce de blob difforme, une patte gluante avec laquelle elle lutte pour conserver une apparence humaine. Cette malédiction, due à l’absorption d’un gaz lors d’un tournage, dégouline par tous les pores de sa peau au point de la rendre complètement difforme lors de ces moments où elle peine à garder le contrôle.
Mais au moins, elle peut tromper les apparences contrairement à Robotman qui est un monstre ambulant. Ce pseudonyme est suffisamment clair pour définir son propriétaire. Interprété par Brendan Fraser, éternel O’Connel dans La Momie, il a la lourde tâche de faire passer la totalité de son jeu derrière son casque. Cela rend d’autant plus importantes sa gestuelle et l’intonation de sa voix pour se faire comprendre dans un corps qu’il peine à apprivoiser. Cleeford Steele de son vrai nom, son cerveau, seul vestige d’un accident de course, se débat dans cette carcasse qui est devenue son enveloppe corporelle à part entière.
Du moins, c’est une partie de la vérité telle qu’il la découvrira au fur et à mesure des épisodes. Ce passif rend Robotman extrêmement touchant et son impulsivité le rapproche beaucoup d’un personnage comme Hellboy. Ils ont en commun cette même corpulence de gorille avec cette mâchoire inférieure proéminente tel que Mike Mignola l’aurait dessiné s’il avait officié sur ce comics. Mis au sein d’un groupe tel que la Doom Patrol, cela fait des autres membres des copies de ceux du BRPD venant épauler le diable rouge dans ses aventures. En cela, toute cette joyeuse bande de freaks aurait pu plaire à Guillermo Del Toro tant ils sont perfectibles en tout point.
Mais à lui tout seul, Robotman symbolise un classique de la littérature qu’est le magicien d’Oz. À ce dernier, le trio qui croise le chemin de Dorothy lui réclame chacun un souhait. Tout comme l’épouvantail, Cleeford fait peur à voir et réclame un cerveau afin d’être plus intelligent. C’est pourtant le seul organe qui lui reste, mais il ne sait pas l’utiliser à bon escient. Pour sa part, le lion aimerait avoir du courage tout comme il en faudra à Robotman pour accepter sa situation. Et enfin, l’homme de fer blanc est le plus évident en termes de ressemblance, mais aussi par rapport au voeu qu’il formule: avoir un coeur.
Malgré cet assemblage de pièces détachées et de rouille, Robotman reste le coeur de cette équipe par sa grande compassion et ses élans de générosité. C’est le plus abimé par la vie et c’est le magicien d’Oz de cette histoire qui va le remettre sur pieds, bien qu’il ne puisse lui-même en faire usage. Cloué dans une chaise roulante, Niles Caulder recrute et gère ces phénomènes de foire depuis son manoir tout comme le ferait le professeur Xavier. Son handicap n’arrange rien à la comparaison avec les mutants de chez Marvel, mais l’interprétation de Timothy Dalton est suffisamment différente pour s’éloigner de cette source d’inspiration majeure.
Ça et le fait que son équipe est loin d’être composée de surdoués. À titre de comparaison avec la création de Stan Lee et ses adaptations cinématographiques, cette série arrive tout de même à faire ce que le dernier film en date de la franchise n’a pas réussi. New Mutants avait été vendu comme étant une incursion du genre super-héroïque dans l’horreur sans pour autant y parvenir contrairement à Doom Patrol. En un seul épisode, le sixième, on a le droit à tout un tas d’hallucinations vraiment flippantes capable de rivaliser avec ce qui se fait sur grand écran. Et bien sûr, tous ces malheurs auxquels on assiste sont le fruit d’une seule personne, ou pas si l’on se fit à son nom: Mr Nobody.
Et là, il est difficile de trouver un point de repère tant son design est bluffant et unique en son genre. C’est un véritable puzzle inachevé ambulant auquel des effets spéciaux viennent donner vie. Ou en tout cas ce qu’il en reste. C’est Alan Tudick qui lui prête ses traits, du moins autant qu’on puisse en voir lorsqu’il est sous cette forme. Mais le personnage étant le narrateur de cette histoire, l’acteur devient alors visible dans une espèce de pièce entièrement blanche de là où il contrôle les opérations. Cela n’est pas sans rappeler le programme de chargement dans Matrix et cette référence est loin d’être gratuite compte tenu de la thématique méta omniprésente.
Par choix scénaristique ou difficulté à animer un concept aussi inédit qu’un personnage auquel il manque des cases, littéralement, Mr Nobody n’apparait que rarement contrairement à sa voix. En off, il s’occupe de narrer les temps forts de l’intrigue, mais aussi de résumer les épisodes précédents. Autant dire que l’on est très proche de l’adaptation de Deadpool avec cette façon de commenter les actions des personnages comme s’il n’était qu’un simple spectateur. Il ne se gêne d’ailleurs pas pour adresser quelques piques à leur intention ou à parler aux plus fans d’entre eux en mentionnant Grant Morrison.
Auteur de comics, ce dernier fait partie des artistes qui ont façonné l’équipe de la Doom Patrol tel que l’on peut la voir à l’écran. Et tel que s’amuse à tourner au ridicule Mr Nobody. Il a tellement conscience d’être dans une série télévisée qu’il va jusqu’à s’extasier devant la beauté du générique. Et il a bien raison. Dans la lignée de Game of Thrones ou de Westworld, l’opening ainsi que la musique qui l’accompagne n’ont rien à envier à ces deux shows de HBO. Cela reflète bien l’esprit général à travers un montage de plans tous plus dérangeants les uns que les autres. Chaque membre a le droit à son imagerie conceptuelle, mais surtout glauque.
À l’image de ce que je viens de faire, tout ceci n’aurait pu être qu’une banale présentation de personnages telle que celle que l’on peut voir dans l’épisode pilote. Même si tout reste encore un peu flou à ce stade, on peut en deviner les enjeux ainsi que les forces en présence. C’est une entrée en matière qui demande à être développée et qui le sera de manière surprenante, notamment concernant le passé de Robotman. Puis le deuxième épisode vient ajouter un nouveau membre afin de prêter main-forte à l’équipe: Cyborg. Malgré son statut de personnage secondaire, c’est grâce à lui que l’on peut identifier d’où vient la série et dans quel univers on se situe.
Présent chez les Teen Titans, mais aussi dans la Justice League, c’est ce qui permet d’ancrer ce récit dans l’univers DC. L’introduction de Victor Stones se fait d’ailleurs par l’intermédiaire d’un distributeur de billets de banque qu’il contrôle à distance et qui est l’occasion de citer Bruce Wayne parmi les choix possibles sur l’écran. Contrairement au contexte dans lequel cela intervient, c’est loin d’être gratuit et plutôt inventif. Les autres références à la Distinguée Concurrence ne seront pas aussi subtiles, mais toujours l’occasion pour la Doom Patrol de se moquer de cette nouvelle recrue.
Son père est également présent et par extension Star Labs bénéficie aussi d’une mention sans pour autant que cela ne soit la même entité que celle présente dans la série The Flash. En effet, ce show est indépendant de l’univers partagé qui a été créé par Greg Berlanti et qui est appelé le Arrowverse. Néanmoins, au détour du crossover Crisis on infinité Earths, on a pu apercevoir la Doom Patrol comme étant répertorié sur la Terre 21. Un caméo de quelques secondes uniquement permis grâce à la magie des terres parallèles, sans toutefois leur faire prendre part à cette aventure.
Pourtant, vu la tonalité générale, ils y auraient tout à fait leur place tant ils se rapprochent de Legends of tomorrow. Qui eux-mêmes étaient grandement inspirés par Les gardiens de la galaxie. Une bande de losers sur qui personne n’aurait parié et qui pourtant ont permis l’incursion d’une toute nouvelle génération de héros sans prétention. Et comme le fera très justement remarquer Star Lord à Tony Stark dans Infinity War, ils ne savent même pas ce que ça veut dire. La Doom Patrol n’a pas l’air d’en savoir plus et malgré leur place à part dans l’univers télévisuel de chez DC, ainsi que la volonté d’unifier toutes les séries de l’éditeur de comics dans un grand tout, les ambitions sont tout autres.
Que ce soit dans la réalisation soignée, la superbe photographie, les scénarios aux thèmes alambiqués, la direction artistique, la gestion de la violence, les effets spéciaux qui n’ont rien à envier au cinéma, la musique soignée… Nous sommes plusieurs crans au-dessus des propositions que sont Arrow, The Flash ou encore Supergirl. Quitte à choisir, il serait beaucoup plus intéressant de voir ces dernières productions rejoindre cet univers atypique que de se risquer à faire apparaitre la Doom Patrol aux côtés de Barry Allen ou Oliver Queen.
Même Legends of tomorrow, qui est ce qui se rapproche le plus en termes d’absurde de l’équipe de Niles Caulder, est de moins en moins présente lors des traditionnels crossovers annuels. Au point de s’en moquer au détour d’un dialogue. C’est dire à quel point il s’agit d’un exercice difficile que de se fondre dans un univers partagé et le parallèle avec les Legends n’a rien de gratuit. À l’opposé sur le spectre de la qualité, avec ce qui se fait de plus faible d’un côté et de plus ambitieux de l’autre, les deux séries partagent pourtant énormément de points communs.
Outre la bizarrerie inhérente à leurs différents membres respectifs, c’est surtout les moments complètement what the fuck qui les rapprochent. Ainsi comme l’équipage du Waverider, on voyage d’une époque à une autre, mais cette fois-ci par le biais des flashbacks. Contrairement aux Legends et à l’arrivée tardive de John Constantine dans la saison 4, suite à l’annulation de sa série perso, Doom Patrol n’aura attendu que son quatrième épisode pour aller sur le terrain de la magie. On a donc le droit à un ersatz de l’exorciste qui sera l’occasion d’ouvrir la porte à toutes les excentricités. Littéralement.
Cela commence par une cigarette qui permet d’ouvrir un portail, un chewing-gum que l’on mâche pour trouver une réponse, une tête de licorne qui apparait pour faire une prédiction,… Moi qui croyais avoir tout vu, j’étais loin du compte. Chaque épisode fait preuve de surenchère dans le concours du scénariste aux idées les plus déviantes. Et il y a du niveau parmi les 15 chapitres avec un personnage victime d’une expérience qui lui donne une deuxième tête de raptor, un oeil géant qui apparait dans le ciel, une blatte qui partage sa hâte de voir la fin du monde ou encore des membres de la Doom Patrol prisonniers d’une boule à neige.
Si les scénaristes essayent de faire passer un message pour dénoncer leurs conditions de travail par l’intermédiaire de cette oeuvre, ce n’est pas très compréhensible. Ou alors cela est seulement dû à l’usage de substance illicite au sein de la writer’s room. Quoi qu’il en soit, je me mets à la place des acteurs qui reçoivent leur texte afin de répéter et de s’imprégner de leur personnage. Il faut en avoir de la conviction dans ce projet pour y participer, mais surtout il faut avoir une foi aveugle envers les artistes qui ont une vision bien précise de ce qu’ils veulent obtenir sur le plateau.
Les choses qui rendent bien sur le papier peuvent vite tourner aux ridicules lorsqu’elles sont dans la boite, mais là c’est l’inverse. Il y a des choses aussi improbables qu’une ville magique qui apparait et disparait, car totalement vivante. Des sbires qui éclatent sous forme de lettres manuscrites une fois qu’ils sont morts, visuellement c’est très inventif. Un chasseur de barbes (!) mandaté par le bureau de la normalité (!) qui peut retrouver une personne grâce à l’un de ses poils. Tout ceci est difficile à prendre au sérieux lorsqu’on le lit, moi-même j’ai eu du mal à l’écrire pour en rendre compte, mais à l’écran la magie opère.
La suspension d’incrédulité est mise à rude épreuve, mais les auteurs font preuve d’ingéniosité pour ne pas s’en attribuer le mérite. C’est notamment flagrant lors d’une séquence de karaoké qui permet de contrôler l’intrigue en cours en tant que narrateur. À croire que les scénaristes ont voulu se dédouaner de leurs idées, toutes plus folles les unes que les autres, pour en reporter la culpabilité sur Mr Nobody qui, grâce à son pouvoir d’omniscient, fait ici un parfait souffre-douleur. C’est donc notamment à lui que l’on doit cette embrassade entre une blatte géante et un rat qui l’est tout autant.
Ça fait beaucoup à encaisser pour un spectateur et celui-ci sera loin d’être au bout de ses surprises. Aussi ridicule soit-il dans son slip léopard et son physique de culturiste, l’arrivée de Flex Mentallo est l’occasion de partir dans des délires grâce à sa capacité à contracter ses muscles pour influer sur la réalité. Alors, lorsque par mégarde il fait un effort sur le mauvais muscle, c’est toute une rue qui se met à avoir un orgasme. Mais avant cela il faudra que la Doom Patrol le libère d’un centre de détention et fera diversion en libérant une armée de culs sur pattes.
Ces derniers n’ont rien d’une insulte pour désigner des hommes de main incompétents, il s’agit réellement de culs sur pattes. Avec des bouches en guise de… Et bien, autant dire que la nourriture parcourt le chemin inverse contrairement à un être humain normal. Encore que l’on est en droit de se demander par où ils expulsent leurs excréments une fois la nourriture engloutie. Le mauvais gout n’est jamais très loin lorsque l’on laisse libre cours à son imagination. Encore une fois, dis comme ça, cette série à l’air de partir dans tous les sens, mais ça serait la jugée bien vite avant d’en avoir une vue d’ensemble.
Tout ceci pourrait être l’oeuvre d’enfants s’amusant à écrire tout ce qui leur passe par la tête ou qui se trouve à leurs portées, mais non, il y a bien des adultes derrières les scripts. Le seul mot d’ordre semble avoir été de laisser exprimer leur âme d’enfant afin de donner vie à une galerie de personnage qui le sont tout autant. Car en l’absence de Niles Caulder, représentant de l’autorité parentale, la Doom Patrol n’est rien d’autre qu’une bande de gosses qui se chamaillent. Mais si l’on regarde bien, on peut voir cela comme une thérapie de groupe où chaque épisode se charge d’explorer le trauma d’un membre en particulier.
C’est une famille recomposée, mais surtout dysfonctionnelle, qui s’entraide dans des aventures à leur image. La série a beau être cohérente dans son incohérence à aligner des concepts tous plus loufoques les uns que les autres, c’est surtout l’émotion qui prime. Tout ceci aurait pu être pathétique de voir des phénomènes de foire se débattre avec leurs blessures psychologiques, mais il n’en est rien. Chaque faille est une occasion de développer ces personnalités bien trempées et solitaires, mais solidaires entre elles. Il y a quelque chose de touchant à les voir unis dans l’adversité, dans leur quête de stabilité.
Aussi différents qu’ils puissent être les uns des autres, ils se complètent. En effet, la symbolique du puzzle est autant présente pour Hammerhead que pour définir la série. On dit que pour faire un puzzle, il faut d’abord en délimiter le cadre avant de s’attaquer au centre. Pour cela, il faut se mettre en quête des bords et des coins puis de les assembler. Une fois chose faite, il faut repérer les motifs similaires dans les pièces qui restent afin de commencer à voir se dessiner l’image présente sur la boite. Pour Doom Patrol, le processus est inversé.
Les pièces de ce puzzle narratif se raccordent sans pour autant que l’image en surface ne correspondent à sa voisine. C’est comme si toutes les pièces manquantes de tous les puzzles du monde s’étaient réunies pour former cette série. Et pourtant lorsque l’on a une vue d’ensemble une fois le dernier épisode terminé, tout fait sens. Malgré la débauche de super-pouvoirs, c’est une histoire terriblement humaine dans toute son imperfection. Chaque membre de la Doom Patrol a son utilité et ne peut se soustraire à l’un de ses co-équipiers. Ils occupent tous un rôle vital dans le bon fonctionnement de ce groupe. Aussi handicapés soient-ils par les épreuves de la vie.
Même s’il ne lui reste que son cerveau, Robotman en est le coeur. Mr Negative est l’âme de cette équipe à l’image de son co-locataire corporel. Sa difficulté à maintenir son intégrité physique fait de Rita le corps qui maintient souder ses compagnons. Malgré la technologie qui prend de plus en plus de place, Cyborg en est le cerveau pour sa capacité à établir des plans d’action. Enfin, Hammerhead, de par son vécu, est l’identité de cette famille. Et comme on dit, toutes les familles ont leurs problèmes, sauf que pour eux c’est cette famille qui est un problème à part entière.
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