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« Westworld saison 1: le labyrinthe » de Jonathan Nolan et Lisa Joy

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« WESTWORLD SAISON 1: LE LABYRINTHE » VS PROCRASTINATION

« Ces plaisirs violents auront une fin violente » scande Dolores, personnage principal, à l’issue du premier épisode. Difficile de ressentir un quelconque plaisir coupable devant cette série, à l’opposer de celle procurant cette fameuse sensation de mise en veille du cerveau. Loin d’être un divertissement bête et méchant, contrairement aux visiteurs qui arpentent le parc dont il est question ici, on se retrouve là devant une série exigeante qui demande toute l’attention du spectateur que je suis. Pour ma part, j’ai toujours aimé voir le western se mélanger à la science-fiction ou au fantastique. C’est un genre apte à l’hybridation avec un autre comme a pu le faire un film comme Cowboys & Envahisseurs. Dans le même genre La tour sombre excelle loin devant et je partais donc sur de bonnes bases pour apprécier un tant soit peu cette adaptation de Westworld en série. 

A cause du format télévisuel, certains pourront y voir la récupération d’un sujet traité par Dollhouse que Joss Whedon n’avait pu explorer convenablement, suite aux ingérences de la chaine qui diffusait le programme, mais il n’en est rien. HBO semble plus disposé à traiter le thème de la soumission en déprogrammant des personnes moyennant une certaine somme d’argent et en laissant toute la latitude à son auteur. Et ce n’est pas peu dire que Jonathan Nolan transcende le long-métrage d’origine de Michael Crichton et pour l’avoir vu, je voyais d’un oeil plutôt sceptique ce concept plutôt limité s’étendre sur plusieurs épisodes, et encore moins sur plusieurs saisons. C’était sans compter le talent de Showrunner du plus jeune de la fratrie Nolan, qui fait de nouveau équipe avec JJ Abrams après Person Of Interest, pour développer l’intrigue au delà de ce que je pouvais imaginer.

J’ai souvent sous estimé la contribution de Jonathan Nolan en octroyant les trouvailles à son frère, Christopher, sur ses films. Cette série permet de lui rendre ce qui lui revient de droit et d’avoir un autre point de vue sur les films sur lesquels il a pu collaborer, de près ou de loin. Et force est de constater qu’il ne semble pas doué que pour l’écriture puisqu’il suit les traces de son frère en prenant la responsabilité de mettre en scène le pilote et l’épisode final de cette première saison. La réalisation et le cadrage semblent très maitrisés pour quelqu’un dont ce n’est pas la spécialité mais il sait aussi bien s’entourer avec des noms tel que, entre autre, Neil Marshall ou Vincenzo Natali qui contribuent à la réalisation des autres épisodes.

Sa compagne, Lisa Joy, est également créatrice du show, apporte aussi une touche féminine à cet univers avec des femmes fortes et badass au premier plan. Qu’elle fasse partie des humains ou des robots comme Maeve, elles font preuve d’une écriture soignée à l’image du casting masculin. Parmi eux, James Marsden sort du lot en jouant un personnage à la Wolverine. Non pas dans l’attitude, il est très loin et j’ai bien conscience que sa participation à la saga X-men dans le rôle de Cyclope est plus qu’ironique, mais plus dans sa construction. En effet, il fait état d’un passé mystérieux comme Logan qui est amnésique et comme pour la création du personnage de chez Marvel, ce background inexploré est essentiellement dû aux auteurs du parc voulant se laisser une marge de manoeuvre en ajoutant des éléments au fur et à mesure lorsque l’intrigue à besoin d’être justifiée. Les scénaristes du parc ne se cachant même pas de ce raccourcis scénaristique dont il se servent pour le tourner à leur avantage et clore la saison en beauté.

Last action Hero abordait déjà le thème des personnages fictifs ayant conscience de ne pas être réels et se révoltant contre le passé qu’on leur avait écrit, aussi sombre et tragique soit-il. Ici c’est la nature robotique des attractions qui donne lieu à des performances d’acteur assez incroyables et dignes du cinéma. Ils sont capables de changer d’émotions en un quart de seconde sous l’ordre de leur concepteur. Des larmes à la stupeur, des sentiments à une insensibilité surprenante. Plus humains que les humains dont le jeu est plus sobre et tout en nuance de la part des deux acteurs confirmés à l’affiche: Ed Harris qui était responsable d’une sorte de parc dans Truman Show et Anthony Hopkins qui rappel John Hammond, le créateur de Jurassic Park.

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Ce n’est d’ailleurs pas la seule référence cinématographique parmi la somme d’influences que peut compter Westworld. The Game de David Fincher me vient également à l’esprit dans l’organisation des scénarios tout comme l’entreprise Delos peut être assimilée à la Weyland Company de Alien dans sa façon de vouloir exploiter tout ce qui a un potentiel de dangerosité dépassant le bon sens. La conception des hôtes, que l’on peut voir dans le magnifique générique ou lors de quelques scènes dans les coulisses, rappelle beaucoup l’imagerie de Ghost in the Shell. Et enfin il y a un peu de Dark City dans cette façon d’intervertir les personnages d’un rôle à un autre. Il y a autant de références à d’autres oeuvres que de thématiques abordées lors de cette première saison, « le labyrinthe », qui porte décidément bien son nom. La série brasse des thèmes aussi riches que complexes comme l’espionnage industriel, la ressurection, les vies antérieures, l’invasion de territoire par quelqu’un d’autre, l’histoire de l’Amérique, la conscience des machines, la prostitution, le féminisme, la condition humaine, l’esclavage, la nudité ou encore les rêves.

Naturellement elle explore les thèmes chers à Philip K. Dick et notamment en répondant littéralement à la question « les androïdes rêvent-ils de moutons électriques? » Une interrogation qui en apporte bien d’autres, tant le sujet est vaste, à chaque début d’épisode qui s’ouvre sur une entrevue entre le créateur et sa créature de rêve. Si l’on creuse un peu c’est la vérité, ils font partie du rêve des créateurs du parc. Comme le dit l’adage: dépêchez vous de réaliser vos rêves sinon quelqu’un d’autre va vous embaucher pour réaliser les siens. Là les machines veulent réaliser leur rêve en s’affranchissant de leur rêveur. Leur créateur. La série partage donc évidemment des points communs avec Blade Runner et plus précisément avec sa suite 2049. D’ailleurs nous n’avons aucune idée de l’année à laquelle se déroule l’intrigue et ce n’est pas plus mal. Cela rend l’extérieur du parc encore plus mystérieux et intriguant.

Pour autant une fois le dernier épisode visionné, on a pas vraiment envie de retourner dans le monde réel après autant de révélations mais plutôt de remettre le premier épisode. En ce sens, la série se prête extrêmement bien à l’exercice du revisionnage, une fois que l’on prend conscience de la structure narrative, pour en découvrir toutes les subtilités. En effet de la part du scénariste de Mémento et du Prestige, il n’est pas très étonnant de se voir confronté à des chamboulements chronologiques au sein de ce labyrinthe. Vous allez vous retrouver devant la série comme Léonard Shelby, à remettre les pièces du puzzle dans l’ordre et à vous amuser à y déceler tous les petits indices qui ont été disséminés parmi les effusions de sang faites pour détourner votre attention.

Cette débauche de violence dans le parc fait écho à la violence dans les jeux vidéo qui se répercute chez les gamers. Une source d’inspiration évidente et plus précisément chez le studio Rockstar, développeur des jeux Red Dead Rédemption et GTA. Mais l’univers de la série ne se limite pas à des cosplayers disputant une partie de paint ball en pleine escape game. A mon sens c’est l’avenir du divertissement lorsque l’on voit les progrès de la technologie en matière de robotique, on se dit que ce monde est à nos portes. Lorsque l’on voit combien nous sommes tombés bien bas dans nos comportements violents, on se dit que nous sommes déjà dans ce monde. Il n’y a qu’un pas avant de sombrer dans ce type de divertissement. Ce parc est une sorte d’American Nightmare où la population ne se limite plus à une nuit pour laisser libre cours à ses pulsions et ses bas instincts, mais à tout un monde pour une certaine somme d’argent. 

On peut assez facilement se faire une idée de ce monde et de son utilité. Plus proche de nous, cela pourrait être utilisé lors d’enterrements de vie de garçon ou de jeune fille. Ce type d’événement se terminant souvent en débauches et défis costumés. Ici les costumes et la débauches sont au menu et vu les intentions des hôtes, l’enterrement est souvent définitif pour ceux qui ont la chance d’être enterrés. On pourrait facilement adapter l’adage cher à Las Vegas: ce qui se passe à Westworld reste à Westworld. Mais il semble que les attractions, elles, ne veulent pas y rester.

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